China Jam Diary / 26 septembre

A quatre heure du matin, à la faveur d’une envie pressante, Steph s’aperçoit que les chameaux sont déjà là à nous attendre. Mais que font-ils déjà ici à cette heure-là ? Ils ont du partir à minuit d’en bas.

Personne ne nous réveille mais nous entendons la tente mess et la tente de nos guides être repliées. Nous sentons un peu de pression et malgré la fatigue et l’absence totale d’envie de sortir des duvets et de se lever en pleine nuit alors qu’il fait un froid glacial, nous nous levons vers 6h. A partir de là, c’est le branle-bas de combat.

Sean part seul chercher les derniers sacs à la moraine. Je le plains, j’aurais envie de l’aider mais j’avoue que je n’en trouve pas le courage. Il semble par ailleurs dire qu’il peut réussir à tout récupérer en une fois. Je sais qu’il a raison mais je sais aussi que ce sera un gros portage et que je me sens mal de le laisser faire ça tout seul.

Steph et moi rangeons tout le matos en quatrième vitesse et comme nous le pouvons dans le noir et le froid.
Nico, rentré tard de son portage vers le camp avancé, dort quant à lui jusqu’au lever du jour.

Sean ne rentre que vers 10h, toujours avec le sourire. Nico est allé à sa rencontre pour le soulager sur la dernière demi-heure.

Nous ne quittons ce magnifique camp de base que vers 11h. Steph part avec la moto pour ménager son pied et nous à pied avec cette fois deux ânes et un chameau.

Je souffre bien avec mon pied et mes gelures. J’ai l’impression qu’une grosse pierre m’est tombée sur les orteils, tandis que je ne sens rien sur les extrémités de celles-ci. J’ai hâte que la marche se termine. Nous croisons quelques yacks prenant leur bain dans la rivière glaciale, des chevaux en liberté, quelques marmottes. C’est fabuleux et ça ne donne qu’une envie : rester un peu plus longtemps. D’autant qu’il y a dans ces prairies une profusion de blocs magnifiques qui donnent méchamment envie de grimper.

Nous arrivons dans la vallée quatre heures plus tard et le bus nous attend déjà. Après une petite distribution de cadeaux à nos muletiers et âniers, nous prenons la route et étonnamment les check-points sont nettement moins nombreux. Nous n’en passons que deux alors qu’à l’aller, nous en avions eu sept.

Nous arrivons vers une heure du matin à Aksu, et retrouvons au même instant le confort et la « civilisation ». Notre arrivée, crade et pouilleux, avec nos sacs défoncés et nos mines fatiguées ne passent pas inaperçu dans l’hôtel de luxe dans lequel nous débarquons (seul hôtel de la ville autorisé à recevoir des touristes).

Nous allons manger près de la gare routière, à côté de gargottes proposant toutes des mets délicieux typiques de la région. Nous mangeons comme des ogres, nous délectons de brochettes, de pâtes et de raviolis locaux, de soupes, d’intestins fourrés au riz… C’est le top !

China Jam Diary / 25 septembre

Après une matinée sympathique où nous prenons chacun un peu de temps pour nous et nous mangeons autant que nécessaire (il faut dire que nos réserves de nourriture sont encore larges), il nous faut repartir vers le haut, là où hier soir, nous avons laissé une partie de notre matériel.

L’idée étant que nous déguerpissions le plus vite possible de la région. Ce n’était pas notre plan initial mais le fait est que notre permis « de trekking » implique ceci : si l’un des membres de l’expédition quitte les lieux, tout le monde doit partir en même temps. Notre expédition est donc terminée au grand dam de Sean qui est encore bien en forme et qui avait plein d’autres projets dans la vallée.

Nico et moi ne sommes pas plus déçus que cela dans la mesure où l’objectif principal de cette expé a été atteint. Et puis, nous avons des petites gelures aux pieds aussi et nous avons besoin de quelques jours de repos. Bref, de toute façon, nous n’avons pas le choix, il faut partir !

Sean et moi remontons tranquillement vers le dépôt de matériel sur la moraine. Sans sac sur le dos, c’est le bonheur ! Nous ne parlons pas et profitons de cette ballade si belle. C’est finalement tellement rare d’être si tranquille. A chaque fois que nous sommes passés là, nous avions des sacs de mulets sur le dos ou nous devions nous hâter. Cette fois, nous avons toute l’après-midi devant nous.


Nico est parti un peu plus tard que nous et est allé chercher les affaires laissées au camp avancé.
De retour au camp de base vers 19h, nous mangeons à peine et n’attendons pas Nico avant d’aller nous coucher. Il ne rentre que vers 22h.

Nous avons bien bossé et porté tellement qu’il reste à peine plus d’un portage pour une personne à la moraine.

China Jam Diary / 24 septembre

Réveillés au lever du jour, nous nous activons chacun pour plier bagage.
La descente est entamée vers 9h. Nous sommes chacun lourdement lestés des sacs de hissage encore bien chargés. C’est parfois un peu scabreux voire très stressant de descendre comme ça en plein gaz avec un poids si fort tirant vers le bas. Plusieurs fois, nous sommes obligés de demander de l’aide aux équipiers déjà en dessous pour qu’ils nous aident à freiner notre descente en tirant le plus fort possible sur la corde.

Quatre rappels et nous retrouvons déjà l’emplacement du bivouac précédent. De là, nous quittons la voie de montée et tentons de rejoindre au plus vite la neige. Une pente de neige monte en effet sur la droite de notre pilier. Il sera plus rapide de descendre cette pente que de refaire dans l’autre sens les immenses traversées qui nous ont couté tant d’énergie à la montée. Quelques 5 ou 6 grands rappels plus tard, nous voilà sur la neige.

Steph mouline Sean avec tous les sacs accrochés à lui avec la corde statique de 200m. Il arrive tout juste sur une petite terrasse rocheuse. Nico et Steph le rejoigne en rappel avec cette corde. Quant à moi, je décroche le relais, la corde et désescalade cette belle pente de neige/glace.

Reste encore presque 200m encore et nous franchissons la rimaye. Il est 18h lorsque nous posons enfin toutes les affaires sur le glacier.

Le temps de se restaurer un peu, de rééquilibrer les sacs et nous voilà partis vers notre camp avancé avec un sac sur le dos et un sac de hissage à trainer sur la neige comme un traineau. Le glacier est plus dur qu’à l’aller et nous ne nous enfonçons heureusement pas trop. Tirer ces charges avec le baudrier à la taille est un effort raisonnable mais la douleur à ma hernie est insupportable. Nico tente alors de mettre le baudrier au torse et ça marche du tonnerre ! Je le copie et m’aperçois que cela me soulage totalement. Nous parvenons ainsi à rejoindre le camp avancé en un peu plus de deux heures seulement avec tout notre matériel. Il ne sera donc pas nécessaire de remonter pour faire un autre portage au pied de la paroi.

Au camp avancé, juste avant la nuit et malgré le froid, nous nous faisons un bon plat de riz car la journée est loin d’être terminée, nous devons encore descendre au camp de base. Nous laissons une tente au camp avancé et quelques affaires encore puis nous reprenons le gros de nos affaires et reprenons notre entreprise de traction sur la neige et bientôt la glace, jusqu’à la moraine. Nous sommes très heureux d’avoir pu en si peu de temps descendre autant de matériel.

Sur la moraine, il n’est plus possible de faire glisser quoi que ce soit derrière nous, nous refaisons donc une fois de plus les sacs afin d’emporter le nécessaire pour le camp de base. Le dilemme des portages est toujours le même. Soit tu fais des sacs raisonnables mais tu fais alors plus de portages. Soit tu charges la mule, tu évites alors trop de trajets mais tu te casses le dos. Étonnamment, en fin d’expé, quand on a envie que ça s’arrête, le choix est souvent le même : des sacs énormes. Le chemin retour avec ces sacs de 40 kilos sur le dos est long et parfois bien casse-gueule, notamment la nuit. J’avoue que ce genre d’exercice ne me plait guère et je suis bien fatigué sur cette fin de parcours. Nous faisons des poses régulières. Nous arrivons à 1h du matin au camp de base. Nous réveillons notre guide et notre officier de liaison qui sont contents de nous voir. Nous prenons le temps de faire une bonne soupe et un bon thé et nous allons nous coucher, il faudra refaire un portage demain mais cette fois, sans Steph qui doit se reposer et laisser ses pieds tranquilles.

China Jam Diary / 23 septembre

Ouille ouille ouille, ça fait mal les lendemains de push !!

Couchés à 6h15, nous n’émergeons de nos sacs de couchage que vers 14h. Il fait moyennement beau mais le soleil qui pointe parfois le bout de son nez réchauffe alors en un clin d’œil les portaledges, il y fait très bon. Nous ne disons rien, ne faisons rien, nous nous laissons bercer par le doux bruit des flocons qui fondent doucement sur la tente du portaledge que l’on appelle « fly », par le bruit du vent qui fait bouger nos cordes encore accrochées au relais quelques dizaines de mètres plus haut, par le vacarme des avalanches qui dévalent régulièrement les couloirs environnants, par les cris des corneilles qui se demandent toujours si nous allons oui ou non leur laisser quelque chose à manger…

C’est un temps de méditation, de relaxation, de repos, un temps hors du temps. J’ai l’impression que nous ne sommes bons à rien d’autres qu’à … larver ! Sean dort encore. Je tapote sur ce message sur l’ipad, j’entends le réchaud qui turbine dans l’autre portaledge. Tout à coup Steph rompt ce silence et nous dit : « Les gars, j’ai des gelures, je ne sens plus mes pieds et c’est pas beau ». Merde de merde !

Nous sommes encore à 5200m, il est trop tard et nous sommes trop fatigués pour entamer la descente, pourtant il le faudrait. Nous mangeons un bout chacun dans nos portaledges en pensant aux pieds de Steph. Sean et moi ne pouvons presque rien attraper, nous avons les mains défoncées. Une fois rassasié, je m’équipe pour aller voir Steph et lui apporter la pharmacie. Je découvre alors que Nico n’est pas au mieux, il a de la fièvre, il est épuisé et ne se sent de rien faire. Il a des frissons aussi et reste donc tranquillement dans son sac de couchage. Le pied gauche de Steph a une sale tête, trois orteils sont bien noirs, disons violacés plutôt jusqu’à la première phalange. Je ramène à Steph un de mes petits bacs en plastique pour matériel photo pour qu’il puisse faire un petit bain d’eau chaude à son pied.

La nuit tombe déjà. Je retourne voir Steph après avoir obtenu le numéro du service SOS Gelures de l’Ifremmont, afin de passer un coup de fil avec le téléphone satellite. Il faut bien que ça serve à quelque chose. Je tombe sur une femme médecin très agréable et attentive. Je lui décris le plus précisément les symptômes et elle nous explique la marche à suivre. C’est très clair : Steph n’est pas loin d’avoir des gelures de stade 3 et il faut impérativement qu’il perde de l’altitude au plus vite. Elle nous explique qu’il doit à partir de maintenant prendre de l’aspirine 250mg par jour et des antibiotiques parce que ses pieds vont faire des cloques très vite et risquent donc de s’infecter. Pour le reste, puisque le bain d’eau chaude a déjà été fait, il ne reste pas grand chose d’autre à faire. Elle me demande si nous avons un caisson hyperbar avec nous. Je lui explique que nous sommes encore en paroi et qu’il n’y en a pas non plus au camp de base, nous sommes dans un coin paumé de la Chine et non pas au camp de base du K2 ! Bref, pas de caisson quoi.

La communication coupe et je n’ai pas le temps de la remercier malheureusement mais nous nous promettons de le faire dès que possible.
Nous nous couchons en sachant que demain sera dévolu à une descente la plus rapide possible vers le camp de base. Nous élaborons tout un tas de stratégies mais sans savoir vraiment combien de temps nous allons mettre pour rejoindre le pied de la paroi, il est bien difficile de savoir si nous arriverons à rejoindre le camp de base le jour même.

Priorité, se reposer pour être le plus en forme possible demain.

China Jam Diary / 22 septembre – Summit Day

Le temps de la veille ayant été neigeux toute la journée et la face étant totalement plâtrée, nous n’étions pas tous très motives pour faire une tentative vers le sommet aujourd’hui. Steph et Nico dans un portaledge n’avaient pas franchement envie de passer une journée à déblayer la neige et surtout à se cailler, tandis que Sean et moi étions plutôt très chauds pour tenter le coup. Nous avons donc eu une discussion de portaledge à portaledge et nous avons finalement convenu qu’au regard de notre faible autonomie en nourriture, il serait trop aléatoire et risqué de ne pas profiter de la première journée de beau temps venue même s’il y avait de la neige sur la face.
Nous avons donc mis l’alarme à 7h et nous sommes endormis aussi excités que la veille, en espérant que cette fois le temps au réveil serait au beau.

Quelques nuages mais un ciel globalement bleu, voila le tableau au réveil, un tableau qui nous a décidé à tenter le push vers le sommet.

Départ sur les cordes fixes vers 8h30. Sean est une machine ce matin et avance comme un avion sur les statiques. Steph le suit mais n’est pas en forme et me laisse passer. Un peu plus haut, je galère et perds des forces dans une remontée en traversée dans laquelle la corde était trop tendue pour la technique que j’utilise. Je ne rejoins Sean qu’une bonne heure et demi après son arrivée au bout des cordes fixes. Il a tout préparé et déborde d’énergie. Je ne prends même pas le temps de m’installer et l’assure au plus vite pour qu’il puisse grimper la longueur suivante, peut-être la dernière longueur de rocher de la voie. Nico ferme la marche et prépare avec Stéph les relais qui nous serviront pour la descente.

Sean attaque la longueur suivante en rocher avec quelques résidus de neige de la veille mais rien de terrible. Le soleil généreux a déjà nettoyé la voie du gros de la chute de neige. Il fait froid mais dans le feu de l’action, c’est plutôt agréable. Nico le suit et nous montons Steph et moi avec toutes les affaires sur la statique qu’ils ont fixé.


Au relais suivant, il faut enfiler les crampons et préparer les piolets, je m’en réjouie et je m’encorde cette fois pour grimper. Nico fait cette longueur de mixte bien marrante et nous suivons Sean et moi, en flèche. La longueur suivante est une magnifique goulotte de glace parfaite. Sean la randonne littéralement et nous suivons joyeusement Nico et moi. C’est cool, ça va vite ! Puis Nico enchaine avec une longueur en neige qui nous fait franchir un échine et buter contre un ultime ressaut rocheux qui semble bien délicat avec des draperies et peu de lignes de faiblesse. Nous n’avions pas prévu ça, il est deja 17h. Sean attaque par une traversée délicate sur de fines coulures de glace posées sur du rocher. Puis il franchit non sans mal un étroit goulet et enchaine dans une dalle de rocher avec seulement quelques fissures bouchées de glace. C’est une magnifique longueur de mixte, la plus dure qu’il ait jamais gravi dira-t-il plus tard. Il crie « relais, vaché », nous sommes soulagés et montons le rejoindre au plus vite.

Suit une grande longueur de neige, ça n’en finit pas. Au relais, Sean zippe du pied et vient planter ses deux crampons dans mes deux genoux. Rien de grave mais une petite frayeur et une bonne douleur sur le coup. Il enchaine dans une nouvelle pente de neige et se retrouve rapidement en bout de corde. Nous le suivons donc en corde tendue (j’aime pas ça) sans aucune protection entre nous (j’aime vraiment pas ça) et Sean qui a du trouvé un relais ou un coin plus confortable nous tire Nico et moi comme un fou alors que nous sommes en plein dans une grande traversée horizontale dans une pente raide en neige inconsistante et pulvérulente sous d’énormes corniches. Nous hurlons « ne tire pas !!! » sentant que nous allons bientôt être entrainés dans la pente. Mais il ne cesse de tirer, il ne nous entend pas. Nous le rejoignons finalement sur un replat de neige.

Nous sommes au Kirghizstan !!!!

J’enchaine par une nouvelle traversée versant kirghize pour retrouver un vrai relais sur du rocher parce que là, le relais sur lequel Sean nous a tous assuré n’est constitué que des deux piolets de Sean plantés dans la neige molle, autant dire que c’est pas top !

Le soleil se couche alors que j’assure mes trois compères qui me rejoignent. La nuit tombe rapidement et le vent de ce cote est plus fort et glacial, la température chute brutalement. Reste encore quelques mètres en mixte. Nico monte et fait relais sur un bloc rocheux trois mètres sous le sommet. C’est gagné. Nous sommes congelés mais heureux. Il est 22h!

Nous ne trainons pas et entamons la descente au plus vite. Un rappel en traversée sur la crête neigeuse puis un autre sur le replat où Sean nous assurait quelques temps plus tôt que nous tentons d’améliorer avec d’autres piolets et en creusant une sorte de corps mort. Nous rejoignons un bloc rocheux sous une corniche et y faisons un relais intermédiaire. Puis un autre sur une échine rocheuse. Nous sommes à nouveau en Chine. De là, nous descendons presque tout droit dans la face en espérant retrouver rapidement nos relais de montée, car Stéph les a préparé tout au long de la montée afin que nous puissions descendre le plus vite possible. C’est chose faite deux relais plus bas. 0 partir de là, nous accélérons la descente mais le temps de tirer les cordes, améliorer un peu les relais, les trouver dans le noir, nous mettons tout de même un peu de temps et ne rejoignons le camp qu’à 4h du matin. Une corde s’est coincée quelques 70 mètres au dessus du camp, nous irons la récupérer plus tard.

Au portaledge, nous sommes épuisés mais aussi affamés. Le temps de faire de l’eau et de manger, nous nous couchons à 6h15 du matin.

China Jam Diary / Jour du sommet

Pas de message à vous retranscrire aujourd’hui mais une bonne nouvelle : nos 4 compères ont enfin atteint le sommet du Kizil Asker, hier (22 septembre) vers 22h!

Ils sont exténués car ils doivent lutter contre le froid et des tracas de santé (maux de tête et gelures).

Ils entameront la descente dès qu’ils se seront remis un peu sur pied.

Nous avons tous hâte de découvrir enfin les images de cette folle ascension!
je vous promets de les transmettre dès que je les aurais reçues.

Toujours votre dévouée correspondante pour l’épopée sino-franco-belge.

China Jam Diary / 21 septembre

Le réveil était bien calé à 5h30 et nous étions bien fin prêts pour une tentative vers le sommet dite « en push », mais c’est la météo qui nous a retenus dans nos duvets. Nous étions dans les nuages et il neigeait.

Nous avons repoussé l’heure du départ à 8h mais à 7h30, même topo. Nous avons donc tout simplement et malheureusement annulé notre tentative, en espérant que cette petite dégradation ne soit que passagère et non les prémices d’une perturbation de plusieurs jours. Car nos réserves de nourriture ne sont pas extensibles.

Bref, il est 13h30 et tout le monde dort, lit ou médite dans les sacs de couchage. Dehors, il neige moins mais c’est le jour blanc. Nous espérons également qu’il n’aura pas trop neigé car il reste encore vraisemblablement quelques 200m de rocher à gravir avant de toucher les pentes de neige sommitales.

Encore beaucoup de mystère en somme et rien n’est joué!

China Jam Diary / 20 septembre

Cette nuit, comble de surprise, c’est le boss Sean, celui qui n’avait plus déclaré forfait depuis la première semaine, qui a fait une belle infection accompagnée de fièvre et de frissonnements. Il a tellement mal dormi et a un tel mal de crâne qu’il doit rester au portaledge pour se reposer.

Nous montons Nico, Steph et moi au plus haut des cordes fixes posées il y a deux jours, c’est à dire à la base du troisième ressaut, en récupérant à chaque relai le maximum de cordes pour pouvoir monter le plus haut possible aujourd’hui.

Steph a oublié ses chaussons, moi, je suis de corvée manip de cordes et video, donc c’est Nico qui grimpe. Trois splendides longueurs encore sur un pilier parfait avec de magnifiques lignes de fissures pas trop dures. Arrivé au bout des cordes statiques, il est déjà 18h30, le froid s’installe vite et après avoir fait un peu de rangement et de tri dans les sacs de hissage (matos d’équipement, crampons, piolets… mais aussi rations journalières qui se sont accumulées ces derniers jours), nous redescendons.

Sean va mieux.

Nous avons maintenant fixé toutes les cordes possibles, il nous reste encore environ 400 m jusqu’au sommet et à peu près 4 jours de nourriture. Nous décidons donc de tenter un assaut vers le sommet demain.

La nuit va être courte mais tout le monde est impatient, cela fait tout de même 11 jours que nous vivons dans cette face.
Demain matin, ce sera donc environ 3h de remontée au jumar puis escalade des 200 derniers mètres de rocher puis ascension de la zone de mixte sommitale, et insh’allah la cumbre!
A demain pour le récit de ce qui sera surement notre plus grosse journée!…

China Jam Diary / 19 septembre

Aujourd’hui, au regard des chutes de neige de la veille, nous changeons nos plans. Nous pensions initialement tenter le sommet en partant tôt mais la face est plâtrée.

Nous décidons donc de monter le campement pour pouvoir fixer encore des cordes statiques jusqu’au plus haut dans le troisième ressaut et de là, tenter le sommet.
Nous hissons 4 longueurs et installons le camp sur une superbe vire de neige. La vue est extraordinaire, nous sommes à 5200m maintenant. Nous commençons à voir au dessus de tous les autres sommets environnants. Pour une fois le temps ne se gâte pas et nous terminons cette belle journée tranquillement sur nos portaledges.

Il nous reste encore grosso modo 5 jours de vivres, on entre donc dans le concret. Il n’y a plus qu’à espérer que le beau temps se maintienne.

J’ai eu droit a un beau moment d’adrénaline en étant le dernier à défaire les relais sous les toits dans des longueurs en traversée. Deux gros pendules au moment d’enlever le dernier friend! Youhou! Grosse ambiance!

Nous en sommes à l’heure des lyophilisés. Puis ce sera une bonne nuit.
Demain on monte le plus haut possible pour tenter le sommet après-demain.
Bonne nuit!

China Jam Diary / 18 septembre

Le temps est toujours aussi magnifique, la température est bien meilleure.

Sean tape un essai dans sa longueur dès 10h du mat, je l’assure pendant que Steph et Nico montent pour fixer les cordes statiques le plus haut possible car nous sommes encore loin du sommet.

Sean met un deuxième puis un troisième essai. Il est de mieux en mieux dans cette voie mais le crux est encore dur et il hésite entre une épaule infâme pour monter les pieds ou un monodoigt en inversé en verrou dans la fissure type Cobra crack. Aucune des deux méthodes ne passe à l’enchainement malheureusement mais ça va le faire.

Pour ne pas rester sur un vide et même s’il veut revenir pour l’enchainer, il décide de faire une variante pour rejoindre la longueur supérieure. Une fois la formalité faite, il rejoint Nico et Steph qui avancent.

Steph redescend et Nico et Sean fixent jusqu’à la deuxième grosse vire de la face, en gros, c’est le deuxième tiers! Il reste encore une troisième face d’environ 400m avant d’atteindre les pentes du sommet.

Un orage éclate et la neige tombe dru. Moi, j’ai fait ma journée de repos et après avoir assuré Sean, j’ai fait de l’eau pour les jours à venir. Deux bonbonnes de gaz y sont passées.